À propos des bateaux ancrés
« au collet »
Comment c’était dans une communauté de Terre-Neuve
Hilda Chaulk Murray
Préface par Otto Tucker
Pages 41-43
D’après ma recherche, j’ai appris
que par 1818-1820, la plupart des planteurs de la région d’Elliston,
leurs familles, servants et actionnaires – plus de deux cents âmes en
tout– étaient fournis par la firme de Slades basée à Trinity en
provenance de Poole, en Angleterre. Dans les « livres de lettres » de la
compagnie (c'est-à-dire les livres comprenant toute les correspondances
de la firme,) on fait référence de temps à autre à des « chaloupes. »
(dans la version originale anglaise : shallops) Parfois aussi, on
mentionne un shalloway et une « demie chaloupe » fut également
utilisée dans la région de Trinity. Cette dernière semble avoir été « un
bateau capable de transporter la moitié de passagers que ne pouvait le
faire une « chaloupe. »2
William A. Baker dans son livre « Sloops
and Shallops » dit:
Un mystère de chaloupe qui n’est
toujours pas résolut, par contre, est celui de la « demie chaloupe »
mentionnée dans deux rapports d’expédition d’exploration de Barthomew
Gosnold en Nouvelle-Angleterre en 1602; il ne semble pas y en avoir
d’autres. Gabriel Archer et John Brereton font tous deux mention du
hissage de « la moitié de notre chaloupe » et indiquent que c’était une
unité capable de transporter des gens sans risque.
L’historien Prowse maintient que:
Les bateaux utilisés pour le pêche
à la morue et la chasse au phoque étaient autrefois appelés chaloupes et
shalloways, ces mots se trouvant souvent dans notre histoire. La
chaloupe était un grand bateau ponté à chaque bout et ouvert dans le
centre avec des planches de pont et des livres mobiles; il y avait des
cabines habitables en avant et en arrière où les pêcheurs pouvaient
dormir. Il n’y avait jamais moins de trois hommes par chaloupe; leurs
dimensions étaient de quilles de 30 à 40 pieds, leurs poutres de 10 à 14
pieds; plusieurs des chaloupes plus grandes avaient cinq hommes à bord
et pouvaient transporter 200 quintals de poisson séché. Les
shalloways étaient des bateaux ouverts qui sont aujourd’hui appelés
des plates. Les bateaux à voile (sprit-sail boats) ont
probablement été copiés des modèles irlandais tout comme l’image du
Wexford Herring Cot. Il n’y avait pas de feu sous le pont; les
appareils de cuisson de la galère étaient construits de pierres et se
trouvaient habituellement dans le gaillard d’avant. 4
Les premiers vaisseaux pontés
utilisés pour la chasse au phoque étaient environ de la même taille que
les bateaux occidentaux ordinaires, soit d’une quille de quarante à
cinquante pieds de long et d’une poutre de quatorze à quinze pieds de
long. 6
La description de la chaloupe
qu’en fait Prowse n’indique pas précisément la forme du bateau. Par
contre, Baker dans Sloops and Shallops dit ceci :
Mes “Notes sur une chaloupe »
affirmaient que d’après Mainwaring, on trouve que « la forme joue un
rôle dans la définition d’une chaloupe mais il n’a pas été possible de
déterminer comment exactement. » En se basant sur la description dans la
Instruction Nauthica et l’évidence illustrée du manuscrit
portugais de 1616 qui a un dessin d’un « esquife, » il n’y a
maintenant aucun doute sur le fait que la forme de la partie arrière
déterminait la différence de base entre un esquif et une chaloupe. Le
premier avait un arrière carré tandis que le dernier avait un arrière
double.7
Alors que la chaloupe était
disparue de la région d’Elliston, peut-être par le milieu des années
1800, les pêcheurs utilisaient encore un « bassin de chaloupe » comme
unité afin de mesurer la quantité de poissons au milieu du vingtième
siècle. Là, un « bassin de chaloupe » était une coupure – d’un baril de
farine aux trois quarts d’un baril, 112 livres. Trois « bassins de
chaloupe » de poisson frais, pas encore vidé, égalaient à un quintal
de poisson sèche. Cette manière de mesurer le poisson était
vraisemblablement venue de l’époque où la chaloupe était la plus commune
des embarcations de pêche. Il y avait toujours un « arrière double »
dans la communauté vers la fin des années 1940.
D’un article de National
Geographic en juillet 1985, j’ai appris que les baleiniers basques qui
fréquentaient la côte sud labradorienne tôt au cours du 16e
siècle se servaient de « chalupas. » Des archéologues ont trouvé :
… Les restes bien préservés d’une
chalupa qui était sous la coque d’un galion naufragé à Red Bay. Le
navire de 16 pieds de long avait six bancs de nage pour autant de
rameurs, un de plus que le bateau baleinier standard de la
Nouvelle-Angleterre. L’archéologue [Robert] Grenier croit que l’homme
supplémentaire était nécessaire pour de la force additionnelle pour
remorquer les baleines mortes jusqu’au rivage.8
Contrairement aux bateaux de la
Nouvelle-Angleterre qui se rendaient rapidement à une baleine avec une
ligne d’harpons, les équipages basques attachaient une ancre flottante
au bout d’une ligne et la lançaient à l’eau quand la baleine était
prise. Ensuite, ils devaient suivre la baleine jusqu’à ce qu’elle monte
à la surface et qu’ils puissent la tuer avec une lance. 9
Est-ce que la ligne était enroulée
soigneusement dans un « bassin de chaloupe » quand on ne s’en servait
pas? Peut-être que la taille de l’ancre flottante aurait prévenu un tel
entreposage.
Une peinture accompagnant cet
article aux pages 44-45 montre un équipage basque en action. Le devant
et l’arrière de la « chalupa » sont identiques- c’est un bateau à deux
têtes, avec des petites cabines habitables à chaque bout. Un verrou pour
la rame en mouvement est visible du côté gauche à l’arrière. Les rameurs
s’exécutent en position debout. Ils sont six.
Sous une image d’un Wexford
Herring Cot dans son Histoire de Terre-Neuve, D.W. Prowse a
cette note :
C’est à partir de cette petite
embarcation pratique que nos pêcheurs ont eu l’idée du bateau maintenant
utilisé aussi couramment à travers la colonie; il a supplanté les voiles
traînées vers la fin du siècle dernier.
« Le bateau maintenant utilisé
aussi couramment à travers la colonie » que mentionne Prowse est
peut-être le bully ou le bully boat qui était
utilisé dans la région de Old Perlican de Trinity Bay il y a 140 ou 150
ans,11 et dans la région d’Elliston autour de la même
période. 12 Cependant, le nom bully boat, un bateau de
pêche commun, semble être particulier à Terre-Neuve. Dans les bateaux de
pêche britanniques ou les embarcations côtières, on fait mention des « bullies »
mais ici, le nom fait référence à des navires transportant du charbon.
Le type le plus ancien était un
bateau à double bouts hardi, sans gouvernail, presque dépourvu de
tonture - en fait, de vrais plats- et pour la grande partie de leur
longue existence étaient
construits de cans.13
On référait à ces navires en tant
qu’ « hommes de quilles, » puisqu’ils étaient très grands, leurs
dimensions principales étant de 42 pieds de long, 19 pieds de large et 6
pieds de profond. 14
Peut-être que les pêcheurs
terre-neuviens utilisaient le terme « bully » en voulant dire «
bon », utilisant la signification du seizième siècle. De toute manière,
tous ceux concernés ont dit que c’était un bon bateau à voile – un
bateau « bully. ».
Les dimensions des bullies
variaient, avec des quilles entre vingt et soixante pieds. Un bully
typique de Old Perlican était une embarcation non pontée, d’environ
quarante pieds de long avec un bau de dix à douze pieds. À l’avant, il y
avait une salle de places debout. À partir de cette dernière, une petite
porte s’ouvrait sur un gaillard ou une cabine où pouvaient dormir les
hommes. Un ballast, rempli de pierres, était situé entre la courbe au mi
bateau et le croc arrière. Il était environ deux pieds de large et
s’étendait sur la largeur du bateau. On cuisinait ici. La toile d’un
bully consistait d’un foc, d’une grande voile et d’une voile de
misaine. Sur les premiers modèles, il n’y avait pas de bôme principal;
15 la seule bôme était la corne. 16 La grande
voile était fixée à un outrigger à l’arrière. Et, un tel bateau n’était
pas utilisé pour la pêche. Dans le besoin, on pouvait y transporter du
poisson salé jusqu’à St John’s, plaçant le poisson séché dans la partie
non pontée du bateau, couvert d’une bâche afin de la garder au sec.
17
La plupart des bullies
utilisés à Elliston étaient de vingt à trente pieds de long et n’avait
pas un « arrière double ». Ils se distinguaient principalement par leur
gréement – une voile de misaine, une grande voile et un foc. Plus tard,
il y avait une bôme au bas des voiles mais, on se servait principalement
d’un balestron ou d’une livarde. Cette livarde s’étendait diagonalement
à travers la voile. Une courroie allait autour du mât et il y avait une
pièce clouée au mât avec des encoches et une « gueule » autour du mât
qui pouvait monter pour s’emboîter dans les encoches. Ceci gardait la
livarde en l’air et la voile tendue. Au bas de la voile, il n’y avait
qu’une corde. Les plus gros bateaux avaient une bôme suspendue à un
espar au fond mais, ils se servaient toujours de la livarde et une
poulie et un palan servaient à lever la voile. Certains des plus gros
bateaux avaient des cornes, qu’on pouvait gérer plus facilement que les
balestrons.
Bien que les bateaux à moteur des
années trente et quarante ressemblaient aux bullies en général,
il y avait des différences distinctes. Les bullies étaient plus
profond à l’arrière. Un informateur a dit :
Un bully est restitué tout
au long. Il est bordé jusqu’à la quille mais a tout l’évidage – des
couples pitcher jusqu’à la voûte. 18
Généralement, un bully
avait une poupe carrée, c'est-à-dire, en ligne droite avec la quille.
Certains avaient un tableau puisque le type de poupe dépendait du
caprice du constructeur. Par contre, un bateau à moteur avait toujours
un tableau et était plus rond alors que le bully était plus
évidé; il avait des couples pitcher ronds plutôt que des couples
pitcher creux en arrière du croc arrière.
Les pêcheurs-constructeurs de Old
Perlican et d’Elliston mettaient beaucoup d’emphase sur l’évidage de la
membrure; c’est ce qui rendait le bateau aussi stable.
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De larges bateaux pontés étaient
utilisés par des pêcheurs dans la région d’Elliston au cours de la
période de la pêche à la palangrotte. Ils n’utilisaient pas les termes
« goélettes » ou « petites goélettes » comme le faisaient les pâcheurs
de Old Perlican. Les bateaux pontés variaient en longueur de quarante à
soixante pieds. Ils remorquaient au moins deux plates, et en avait
peut-être également une sur le pont. Sur un tel bateau, l’équipage
d’environ cinq hommes, demeuraient à la mer plus longtemps et pouvaient
aller pêcher plus loin de la rive, comme par exemple aux « Haypooks » ou
aux « Skerries, » qui se trouvaient de sept à neuf miles de la côte. La
plupart des plus petits bateaux fréquentaient les fonds de pêches de
deux à trois miles de la côte – comme le « Storehouse, » « Lousy
Shirt, » « Flowers » et, « Chaulky Cliff. » Même ceux qui pêchaient « à
mains croisées » pouvaient naviguer à ces fonds de pêches.
Certainement que la dimension et
le nombre de bateaux disponible à un pêcheur ou un capitaine en
particulier dépendait d’où il était rendu sur l’échelon des pêcheurs.
Sans doutes qu’un pionnier terre-neuvien prospère au début de la
colonisation employant un certain nombre de servants ou de pêcheurs
actionnaires, aurait au moins un grand bateau afin que son équipage
puisse pêcher les fonds de pêches de sept à douze miles de la côte. Il
aurait aussi des plus petits bateaux afin de pêcher les fonds plus près,
de un à trois miles du bord et également afin de transporter les
équipages du lieu d’ancrage « au collet. » Un pêcheur à « main
croisées » n’avait qu’un seul bateau.
Les bateaux bullies étaient
les bateaux préférés à Elliston au cours de la dernière partie du
dix-neuvième siècle et au cours des deux premières décennies du
vingtième siècle comme le démontre une photographie du collet d’Elliston
prise en 1920. Seulement quelques bateaux à moteurs sont visibles. Par
contre, un photographie prise du même collet en 1928 démontre que le
bully à voile est presque disparu, remplacé par l’esquif à piège ou
le bateau à moteur, reflétant le changement des méthodes de pêche, ce
qui exigeait des changement dans les bateaux de pêche.
Une inspection des retours de
recensement pour la période de 1836 à 1945 démontre que quoi que de
petits et de gros bateaux de pêche étaient utilisés à Elliston, ce sont
les petits qui prédominaient au cours de cette période. Ceux-ci entrent
dans trois classes distinctes :
(i)
Le bateau de pêche non ponté, de 25’ à 30’, qui serait mis « au
collet » pour la nuit.
(ii)
Le plus petit, de 20’ ou moins, qui pouvait être hissé sur la
berge le soir.
(iii)
Le rodney, la plate ou le remorqueur, de 12’ à 18’, qui
serait tiré à chaque soir.
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Malgré la prédominance des bateaux
de quatre à quinze quintaux, il y avait un bon nombre de plus gros
bateau qui pouvaient transporter trente quintaux ou plus. En 1869, il y
avait quarante-cinq bateaux dans la classe de quatre à quinze quintaux,
seize dans la classe de quinze à trente quintaux et, deux dans celle de
plus de trente quintaux. Donc, en 1869, le ratio est de près de trois à
un en faveur des plus petites embarcations. En 1874, il y en avait
soixante-dix-sept dans la classe de quatre à quinze quintaux, treize
dans la classe de quinze à trente et, quatre dans celle de plus de
trente quintaux.
Par 1884, il y en avait 102 dans
la plus petite classe, six dans celle de quinze à trente, une dans celle
de trente et plus et, il y avait deux vaisseaux entre vingt et soixante
tonnes. Par 1884, alors, les plus petits bateaux sont certainement la
grande majorité. Après 1891, les bateaux sont classés comme étant dans
la classe de quatre à trente quintaux. Tous les bateaux, à l’exception
de deux, entrent désormais dans cette catégorie. (Voir le tableau à la
fin du troisième chapitre.)
Au cours des années quarante et
cinquante, le bateau à moteur moyen « rempli à ras bord » transportait
probablement autour de douze à quinze quintaux. Par conséquent, si un
équipage à piège obtenait cinquante quintaux, ils devaient faire
plusieurs voyages afin de tout le rapporter. Habituellement, lorsqu’une
si bonne chance tombait sur un équipage à piège, ils en donnaient à tous
les pêcheurs des tas à tous les pêcheurs de ligne et hameçon autour. Ils
leur rendaient la pareille en les aidant à « remiser » le poisson plus
tard.
Le rodney – le plus petit
des bateaux non pontés, propulsé par deux petites rames ou pagaies et un
aviron de godille – était indispensable aux pêcheurs à pièges, en fait à
tous les pêcheurs qui se servaient d’un bateau qui était amarré « au
collet ». Il transportait les hommes entre les plateformes à poisson ou
la rive et le bateau amarré et vice versa; il pouvait servir à bateau de
sauvetage si quelque chose arrivait à un plus gros bateau; il
agrandissait la zone à pêcher dans les fonds de pêches –une couple
d’hommes pouvaient s’éloigner du gros bateau, laissant les autres à
pêcher où ils étaient amarrés; et c’était absolument primordial d’avoir
un rodney quand on traînait un piège quand une marée s’écoulait.
Lorsque des équipages pêchaient à la ligne et à l’hameçon et que l’appât
de préférence – le caplan – ne pouvait qu’être trouvé dans un ravin
étroit ou l’eau peu profonde près de la rive, ils pouvaient lancer leurs
filets depuis le rodney. Et, il servait aussi à la prise de
hareng tôt au printemps. Les filets à harengs ressemblent beaucoup aux
sennes à morue.
On dit que cet important petit
bateau fut nommé en l’honneur de l’un des premiers gouverneurs de
Terre-Neuve, Admiral Rodney, qui fut nommé en 1749.
Rodney a fait preuve d’un bon sens
astucieux, de fermeté, de considération pour la justice et la franchise
et, ce qui est encore plus remarquable pour l’époque, d’un sentiment
bienveillant envers nos travailleurs hardis de la mer, il les a
attentivement protégés de leurs employeurs cupides. »
21
Edwin Baker de Elliston avait
cette histoire de l’origine du nom du
rodney :
Des pêcheurs utilisaient un petit
bateau à rames pour se rendre de la rive au bateau de l’amiral. S’ils
avaient à lui présenter des plaintes ou des disputes, ils disaient
qu’ils s’en allaient « rodney-er ». Et, ce terme est resté pour le petit
bateau. 22
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À Elliston par les années vingt,
les pêcheurs montant l’échelon s’étaient acquis des pièges, nécessitant
des changement dans les bateaux dont ils se servaient pour ce genre de
pêche. À cause de sa fonction, le bateau à piège ou l’esquif à piège
était un bateau non ponté avec son point le plus bas se trouvant au
milieu. Construit premièrement comme voilier, il avait une ou deux
voiles. Les mâts étaient mobiles, et chacun d’eux était attaché en le
passant à travers un trou semi-circulaire dans une axe transversale – le
trou circulaire pour les mâts était complété avec un cercle de fer – et
en le fixant ensuite dans un trou de taille et forme exacte dans la
carlingue dans le fond du bateau. Lorsqu’elles ne servaient pas, les
voiles étaient roulées et mises de côté. Les rames et l’aviron de
godille étaient aussi de l’équipement standard dans un bateau à piège.
Par contre, il était dirigé par un gouvernail lorsqu’il était à la
voile. Plusieurs bateaux à pièges, même lorsque équipés de moteurs,
gardaient leurs voiles et, les rames et l’aviron de godille demeuraient
de l’équipement essentiel. Les pêcheurs n’allaient pas s’éloigner de
plusieurs miles de la rive en faisant complètement confiance à un engin
marin. Je me souviens des mâts, des rames et de l’aviron de godille dans
le bateau à mon père et mon oncle au cours des années quarante et
cinquante.
Nous devons garder en tête le fait
que le type de bateau dont se servait un pêcheur dépendait de l’échelle
de son opération de pêche. Au sein de la même communauté, on pouvait
trouver des bateaux a sennes, des petites plates non pontées, des
esquifs à pièges et des bullies pontées ou semi pontées à
l’époque pré datant les engins à vissage et dévissage. Cependant,
l’engin marin n’a pas annoncé un nouveau type de bateau. Souvent, un
équipage de pêche se servait du bateau qu’ils avaient déjà et si des
changements étaient requis pour recevoir l’engin, ceux-ci étaient faits
mais à la partie arrière seulement. Un bateau à moteur avait besoin d’un
étambot plus lourd pour loger l’arbre de l’engin et un arrière carré
devait être modifié à un tableau dû aux hélices.
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Les moteurs Acadia, Atlantic et
Palmer semblent avoir été les modèles les plus populaires à Elliston.
C’étaient des engins actionnés à gazoline de six ou huit chevaux-vapeur
n’ayant pas de bougie d’allumage, partis en tournant le volant lourd en
acier en avant de l’engin. Ils allaient à cinq ou six nœuds. L’engin de
chaque bateau était différent. De la rive, on pouvait savoir quel
équipage arrivait sans même regarder le bateau. Quoi que la communauté
n’ait pas la réputation de construction navale qu’ont eu pendant
longtemps Trinity et Catalina, il y avait plusieurs constructeurs navals
et d’autres pêcheurs qui équipaient un petit bateau pour usage
personnel. En 1884, les retours du recensement rapportent pour la
première fois le nombre de bateaux construits dans chaque communauté.
Cette année-là, seize bateaux furent construits dans la région de Bird
Island Cove. Toute cette construction n’a pas été faites par un ou deux
constructeurs. Quoi que deux hommes étaient connus pour leur capacité
dans ce domaine et fabriquaient de grands bateaux – de classe de petite
goélette – au quai à Elliston South et à Noder Cove, à Elliston North,
il y avait eu une douzaine ou plus d’hommes capables de former un bateau
comme il le voulait. De par mon histoire de famille, je sais que mon
grand-père paternel Henry Chalk (1854-1904), s’était construit un bateau
à Muddy Brook autour de 1880 et que mes oncles maternels à The Cove -
Bird Island Cove – en avaient également construits. 2
Tous les premiers bateaux
construits dans la région d’Elliston furent construits « moulés ». Sans
doutes que les premiers à construire des bateaux dans la région
d’Elliston, de même que les premiers constructeurs ailleurs à
Terre-Neuve, ont copié les méthodes utilisées par leurs ancêtres en
Angleterre. Peut-être aussi que certains d’entre eux qui avaient passé
du temps à Trinity avant de déménager à Elliston avaient pu observer les
méthodes utilisées par les Newhook, maîtres constructeurs navals,
embauchés par les firmes Lester et Lester-Garland au cours de la fin du
dix-huitième et du début du dix-neuvième siècle. 3
John Barrett m’a dit que ses
ancêtres, parmi les premiers artisans de Old Perlican, avaient apportés
leurs moules avec eux à leur arrivée du Old Country autour de 1710. Il
est très probable que les constructeurs d’Elliston aient fait pareil.
La méthode de construction par
moule, utilisée à Elliston, semble être une forme de « moulage entier »,
une méthode de conception désuète utilisée au cours de et avant le
dix-huitième siècle. 4
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Les demi modèles étaient utilisés
en Nouvelle Angleterre dès le début du dix-neuvième siècle. 5 Mais,
Basil Greenhill de Greenwich, en Angleterre m’a écrit, me disant que :
Les demi modèles étaient
sophistiqués en comparaison et n’étaient que très rarement utilisés dans
ce pays pour la construction de petits bateaux. Presque tous les bateaux
et vaisseaux de pêches autour des côtes des îles britanniques jusqu’à
tard dans le vingtième siècle furent construits par la méthode de
moules, c’est à dire en érigeant premièrement un ou quelques moules,
dressant le bordage de la virure autour d’eux, y insérant la membrure
par la suite. 6
De construire par « modèle » ne
semble pas avoir été fait à Elliston jusqu’à la deuxième décennie du
vingtième siècle. Cette méthode, les informateurs sont d’accord, est
arrivée des constructeurs navals de Catalina. Mon informateur principal
à Little Catalina, Joseph Johnson, a dit qu’au meilleur de ses
connaissances, ils n’ont jamais utilisé le « moule » à Catalina. Son
grand-père et son oncle 7 étaient tous deux des constructeurs navals
connus et ils construisaient des « modèles ». Il pensait que ses
ancêtres avaient apporté la méthode de construction par modèle avec eux
lorsqu’ils se sont établis dans la communauté mais, il ne savait pas
d’où ils venaient. Ils n’ont pas voyagé au continent canadien ou aux
Etats-Unis pour l’apprendre. 8 Au cours de l’entrevue en 1970, John
Barrett a dit que les constructeurs de Old Perlican avaient appris de
construire par modèle des constructeurs de Catalina.
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Les constructeurs de Catalina
avaient construit par modèle aussi longtemps que mes informateurs, tous
dans leur soixante dizaine, pouvaient se rappeler. M A. Hicks, un
pêcheur de soixante seize ans de Catalina m’a présenté trois vieux
modèles qu’il avait trouvé dans l’entrepôt à poisson qu’il avait acheté
d’un M Elliott. Ce dernier était arrivé à Catalina de Raleigh, une
petite communauté près de la pointe de la péninsule terre-neuvienne
Northern. C’est possible que cet homme ait introduit une méthode de
construction par modèle à la région. Il y avait une différence dans le
type de modèle à la région. Il y avait une différence entre le type des
modèles de Little Catalina et Maberly et ceux de Catalina et un
d’Elliston. Le modèle utilisé à Maberly et ceux obtenus de M A.
Cullimore à Little Catalina étaient solides, portant l’empreinte de
compas et de boussoles. Ceux de M Hicks de Catalina et celui qui m’a été
offert par le plus jeune des constructeurs que j’ai interviewés, Thomas
Porter, soixante-quatre ans, de Elliston, sont en couches horizontales.
Les deux types représentent des demi bateaux. Quoi que tous mes
informateurs soutiennent que la méthode de construction navale par
modèle vient de Catalina, M Joseph Johnson, mon informateur principal à
Little Catalina, affirme que l’idée de couper le modèle vient de
« Northern. »
Maxwell Collett, écrivant à propos
du bateau à moteur de Harbour Buffett dans le Newfoundland Quarterly,
en août 1969, mentionne que dans cette communauté-là, les constructeurs
se servaient des deux, les moules – trois minces pièces de bois
utilisées comme patron par lequel on formait les courbes de la membrure
– et le modèle – une forme en miniature à imiter. La définition de
« modèle » qui suit est du type en couches : « …modèle, fait de minces
couches de planches, ne montrait qu’un côté du bateau de la ligne du
centre vers l’extérieur jusqu’au bâbord ou au tribord. » 9 Donc, les
deux méthodes de construction étaient pratiquées dans cette baie du sud.
Et les modèles « tranchés » n’étaient pas que « northern. »
Un constructeur naval se servait
souvent du même modèle pour plusieurs bateaux. Par contre, s’il
souhaitait apporter des modifications à la forme ou aux dimensions d’un
nouveau bateau, il sculpterait un nouveau modèle. Et s’il construisait
un bateau par modèle pour la première fois, il commencerait par faire le
modèle pour se guider. Bobby Chaulk m’a dit comment il s’est pris pour
construire son premier bateau à moteur :
J’avais environ trente ans à
l’époque. Un autre homme dans la communauté, Tom Pearce, m’avait demandé
de lui construire un bateau donc, je l’ai fait. J’ai fait un modèle pour
le bateau pour commencer et je lui ai montré pour savoir s’il aimait la
forme. Ensuite, nous avons débuté le travail. Premièrement nous avons dû
aller « à la campagne » pour le bois. J’ai commencé la construction en
mars. Il était environ 31 pieds de long. Une fois complété, le vieux
Canon Bayley est venu le voir. Il l’a bien regardé et a dit à Tom « T’as
un bon bateau de sauvetage là. » Son premier voyage après sa mise à
l’eau a été « dans la baie » (c'est-à-dire la baie Bonavista) pour des
peaux.
Celui-ci, son premier bateau, en
fut un bon. Je m’en souviens au cours de ces derniers jours, un bateau
ponté d’un bleu délavé, s’effondrant graduellement sur la rive. Il a
construit trois autres bateaux à partir de ce modèle : deux pour des
pêcheurs de The Neck; un pour un pêcheur de Spillars Cove. Ces derniers
bateaux étaient un peu plus petits et n’étaient pas pontés puisqu’ils
étaient utilisés par des pêcheurs au piège.
Les matériaux nécessaires à la
construction d’un bateau en 1850 étaient les mêmes que ceux nécessaires
en 1950. Plusieurs différents types de bois étaient utilisés :
l’épinette pour la membrure; le sapin pour le bordage; et le bouleau
pour la quille. Le bateau avait un « couple cultivé » et non un dont la
membrure était formée par vapeur. Ceci signifiait qu’on passait beaucoup
de temps à chercher des membrures naturellement courbées; on en a eu
besoin de cinquante pour le vieux bateau à Maberly, qui a vingt-cinq
couples. Par contre, des membrures convenables pouvaient être trouvées
plus près de la communauté au cours du dix-neuvième siècle qu’elles ne
le pouvaient au vingtième siècle. Pour les bateaux plus récents, ils
devaient se rendre à des miles plus loin « à la campagne » pour en
trouver des convenables. Des morceaux bons et droits étaient nécessaire
pour le bordage et ils devaient obtenir du bouleau pour la quille « de
la baie » (c'est-à-dire la baie Bonavista.) Il n’y avait pas de
peuplement de bouleau autour d’Elliston au début du vingtième siècle
mais, aujourd’hui il y a beaucoup de bouleaux qui poussent sur le bord
de la route entre Elliston et Catalina.
Tout ce matériau était rapporté à
la maison assez tôt pour qu’il soit convenablement sec. Un homme qui
sortait ses propres matériaux de « la campagne » n’avait que lui-même à
blâmer s’il n’était pas de bonne condition. Traditionnellement, on
construisait les bateaux au printemps à Elliston. Le bois récolté à
l’automne était équarri (c'est-à-dire préparé approximativement) au
cours de l’hiver avant que ne débute la construction au printemps.
Il n’y avait pas de moulins à scie
à Elliston donc, au début, le bordage devait être scié à la main avec
une scie en long. Plus tard, le bordage était scié à un moulin à
Bonavista. Ernest Tilly, en 1958, se souvenait comment on se servait
d’une scie en long pour scié le bordage quand il était jeune garçon vers
la fin du dix-neuvième siècle, et à quel point les constructeurs navals
étaient indépendants :
Il y avait une scie en long le
long de la pierre. D’un bord, il y avait plusieurs morceaux de scie tous
équarri avec l’herminette et prêts.
C’était tout un boulot de monter
le morceau jusqu’au haut de la membrure. Je me demandais comment ils
allaient faire. J’avais remarqué que Tom avait marqué les morceaux avec
des lignes rouges, séparées d’environ un pouce chaque sur toute la
longueur du morceau. Il avait un petit pot d’ocre, avec une bobine de
ficelle à l’intérieur. La ficelle avait un clou à un bout. Il a ramassé
le pot, planter le clou dans le bout du morceau de bois, a marché à
l’autre bout, a tendu la ligne, l’a fait claquer sur le morceau et une
ligne rouge est apparue sur toute la longueur. Il y avait dix lignes,
toutes séparées d’environ un pouce. C’étaient les scies en long, de dix
pieds ou plus. Ensuite, ils ont sorti la scie, de dix pieds de long et
près d’un pied de large avec de bien grandes dents. John a grimpé
l’échelle jusqu’en haut et s’est mis debout sur le morceau de bois bien
équarri à l’herminette de façon à ce qu’il aie un bon huit pouces sur
lequel se tenir. Tom était en dessous. Il a passé un bout de la scie à
John et a mis une paire de lunettes à cause de la sciure. Maintenant,
tout était prêt et la grande scie a commencé à bouger de haut en bas. Ça
n’a pas semblé prendre bien longtemps avant que le morceau de bois soit
tranché en dix bordés de neuf pouces et quart. J’ai trouvé cela
merveilleux je leur ai dit :
« Vous construisez un bateau. Vous
allez couper des arbres, vous les rapportez, les taillez, les travaillez
et les formez. Vous allez chercher du matériau brut dans la forêt et le
travaillez avec des haches, une herminette, une scie, une tarière, un
rabot et un marteau. Tout ce que vous achèterez sera l’ouvrage en fer.
Mais, nous pourrions faire cela aussi s’il le fallait, » a dit Tom. 10
Page 55
Quoi que plusieurs hommes
construisaient leurs plateformes et leurs glissoires d’hiver seulement
qu’à l’aide de hache, marteau, scie et peut-être un rabot, les
constructeurs navals et les menuisiers avaient une variété d’outils en
plus des quatre de base. Dans un vieux coffre à Maberly, j’ai découvert
une variété d’outils de menuiserie et je me souviens du Homer comme l’un
des outils dont se servait Odysseus. C’était un outil essentiel pour le
constructeur naval.
La lame de l’herminette du
constructeur naval est plus longue et un peu plus plate que celles
faites pour d’autres métiers. La poignée qui est d’environ 2’9’’ de long
a souvent une double courbe de façon à ce que son bout inférieur est
rapporté presque en ligne avec le bord coupant de la lame. Le but de la
double courbe n’est pas très clair mais des constructeurs navals
soutiennent qu’il serait impossible de contrôler une herminette qui a
une poignée droite.
L’herminette du constructeur naval
est utilisée pour toutes sortes de formages et de finitions incluant le
taillage de membrure et de bordage courbés. Une méthode de travail est
de commencer une coupure dans une direction et d’ensuite en commencer
une seconde dans la direction opposée de façon à ce qu’elles se
rencontrent; ceci évite de couper trop profondément si le grain tire
vers l’intérieur.
Pour le taillage général, le bout
de la poignée est souvent tenu avec une main sur le genou, alors que
l’herminette est pivotée en va-et-vient à partir de ce point, la poignée
courbée se prête bien à être tenue ainsi.
Un « peg-poll » est utilisé comme
poinçon pour enfoncer les picots et les clous sous la surface du bois
qui se fait tailler.
Pour lisser les bordés, ils se
servaient de longs rabots de bois d’environ trois pieds de long et pour
d’autres parties du bateau, ils se servaient de plus petits rabots
spéciaux, comme ils sont montrés à la page 68. La tarière dont ils se
servaient avait une mèche « moulin à vent. » Afin de mesurer les
modèles, ils se servaient de compas à pointes sèches et ils utilisaient
des étaux pour tenir les bordés en place sur les couples jusqu’à ce
qu’ils soient cloués solidement. Les constructeurs devaient souvent
emprunter pour avoir suffisamment d’outils. Ceci leur permettait de
travailler avec des angles autres que des angles droits.
Page 56-57
Différents types de ciseaux de
calfat faisaient partis de l’équipement de chaque constructeur naval.
Certain de ceux-ci sont montrés à la page 57.
Ces outils en fer de type ciseau,
habituellement de 6 à 7 pouces de long ont une tête champignon et leurs
lames sont souvent évasées. Leurs tranchants sont soit aiguisés,
émoussés ou pourvus de rainures connues comme des plis. Enfoncés par un
« maillet à calfatage, » ils étaient utilisés pour forcer de l’étoupe de
teillage dans les coutures entre les bordés sur le pont et les bords du
navire, afin de le rendre étanche à l’eau. C’est pour cette raison que
les côtés des bordés sont légèrement obliques sur deux tiers de leurs
épaisseurs offrant ainsi une couture ouverte dans laquelle forcer
l’étoupe. Les bordés extérieurs sont calfatés de cette façon seulement
lorsqu’il était bordé à francs-bords et non lors de la construction à
clins.
La couture est premièrement
ouverte, lorsque nécessaire, avec un coin de calfat et les fils d’étoupe
y sont enfoncés avec un ciseau de calfat. L’étoupe est comprimée
davantage (endurcie) et enfoncée sous la surface avec un fer à marquer.
La couture est ensuite remplie de brai.
Le calfatage était habituellement
fait de gauche à droite, le durcissant (avec le fer à marquer) de droite
à gauche. Beaucoup d’expérience et d’habileté étaient nécessaires afin
de juger combien d’étoupe devait être forcée dans une couture; trop
pourrait faire les bordés se séparer ou même ciseler un boulon ou une
gournable mais, trop peu laisserait entrer l’eau. 2
Page 61
Comment est-ce que la véritable
construction était faite? Combien de temps était mis à la construction
d’un bateau? Ce sont deux questions que j’ai posées aux constructeurs
navals. Je me suis fait dire que la construction en tant que telle
pouvait être faite en un mois avec de l’aide mais, le travail
préparatoire commençait bien avant que ne débute la construction. Pour
la quille, ils avaient besoin d’un long morceau droit de bouleau qui
devait être apporté de la baie Bonavista puisqu’il n’y avait pas de
peuplements de bouleau près d’Elliston à l’époque. Pour l’étrave et la
membrure, ils cherchaient pour du bois convenablement courbé « dans la
campagne » à environ 10 miles à l’extérieur de la communauté. Ces pièces
étaient naturellement formées et non forcées en la bonne forme. Dans la
forêt, ils cherchaient toujours pour un arbre qui s’était naturellement
courbé en la forme voulue ou qui avait de telles racines. Pour un bateau
avec vingt-cinq couples, ils devaient amasser plus de vingt morceau qui
pourraient tous donner un « couple » ou, davantage encore si les
morceaux étaient plus petit. Les couples pitcher avant n’avaient
qu’une légère courbe et étaient facilement trouvables.
J’ai appris que la construction
par moule était une méthode courante à Elliston vers la fin du
dix-neuvième siècle mais que, par les années vingt, la plupart de gens
construisaient par modèle. Qu’un constructeur travaille avec un moule ou
un modèle, les étapes principales de la construction demeuraient
pareilles. La différence principale était dans la méthode utilisée pour
obtenir la courbe de la membrure. Ceci affectait grandement la forme
éventuelle du bateau.
Page 61-70
Construction par modèle 1
Pour cette description de comment
construire un bateau à moteur, j’ai intégré l’information reçue
principalement de Thomas Porter d’Elliston, Joseph et Cecil Johnson de
Little Catalina et Bobby et Noah Chaulk de Maberly. Des croquis des
différentes étapes ont également été fournis par ces constructeurs à
partir desquels des illustrations ont été dessinées.
Thomas Porter m’a enseigné que la
préparation au cours de l’hiver – l’équarrissage des morceaux bruts et
ronds de bois jusqu’aussi près que possible de la taille nécessaire
était essentiel avant de pouvoir utiliser le modèle pour commencer
chaque courbe de bois.
(1) La première pièce de bois mise
était la « quille ». Celle-ci était une longue pièce droite qui faisait
la longueur du bateau. C’est à cette dernière que la membrure, ou chaque
couple, était fixée. Elle était placée à travers des blocs et coincée ou
enfoncée en place à l’aide de pièces triangulaires en bois.
(2) Une fois que la quille était
mise, le constructeur décidait s’il posait alors l’étambot. Ceux-ci
étaient tous deux taillés en onglets à la quille, c'est-à-dire,
assemblés de façon à ce qu’ils paraissent être une seule pièce et
assemblés à mi-bois avec des vis boulons.
(3) Lorsque l’étrave et la poupe
étaient érigées, une ligne était mise entre les deux. Les massifs
étaient posés, un en avant afin de bien fixer la quille et l’étrave
ensemble et l’autre en arrière avec un coude d’étambot par-dessus pour
faire pareil à l’arrière. Les massifs étaient fortifiés. Ceci complétait
la construction de la « ligne du milieu. »
(4) Le bois utilisé pour les
couples était approximé aussi près que possible de la taille voulue.
Ensuite, se servant du modèle ou du moule, le constructeur atteignait la
forme exacte pour les divers couples. La plupart des modèles semblent
avoir été faits à une échelle d’un pouce pour un pied donc, pour un
bateau de 25 pieds, le constructeur aurait utilisé un modèle de 25
pouces. Des lignes droites étaient dessinées à travers la longueur du
modèle de chaque côté, séparées d’un demi pouce. Ensuite, des lignes
étaient dessinées dans le sens de la longueur. Ces lignes verticales
donnait la position des couples et étaient espacées sur le modèle pour
correspondre à la distance nécessaire des couples sur le bateau. Tous
les bateaux jusqu’à 35 pieds avaient des centres de 10 pieds. Puisque le
constructeur travaillait avec une échelle de 1/12e de pouce
pour chaque pouce, cela signifiait que les lignes verticales devaient
être séparées par 10/12e de pouce sur le modèle. Les mesures
étaient rapportées sur un tableau plus large et plus profond que ne le
serait le bateau. Sur le tableau, des lignes étaient dessinées à chaque
6 pouces sur la longueur du tableau; le nombre de lignes dépendait de la
profondeur du bateau. Ensuite une ligne était dessinée au centre su
tableau, à travers les lignes préalablement dessinées et, une ligne
était dessinée de chaque côté de la ligne du centre; la largeur entre
ces deux lignes était la largeur de la quille. « Pour prendre le bateau
du modèle, » des compas étaient utilisés sur les lignes de bois et les
lignes à travers le modèle de chaque côté. La distance séparant les
compas était mesurée en pouces, l’échelle étant 1/12e de
pouce égal à 1 pouce. De chaque bord de la quille, la distance entre les
compas sur les lignes dans le sens de la longueur était mesurée et on
plantait un clou dans le tableau. De la même façon, les compas étaient
utilisés dans la même ligne de bois jusqu’à la ligne supérieur du
modèle. Ceci donnait le premier couple de membrure. Une latte était
courbée à chaque clou et une ligne dessinée le long de la latte, ce qui
donnait la forme de la membrure. Ensuite, un moule de plomb était placé
contre les clous dans le tableau. Ceci était placé sur un morceau de
bois brut et la membrure était faite de la forme du moule. Toutes les
membrures pouvaient être faites de cette façon.
Plus récemment, le plomb n’était
pas le seul matériel que pouvaient utiliser les constructeurs afin de
former le bois. Ils pouvaient utiliser du gros carton ou du
contre-plaqué au lieu. Percy Mitchell dans A Boatbuilder’s Story
– ou l’histoire d’un constructeur naval – ne dit que… « des lignes sont
dessinées de plaine grosseurs sur un plancher de bois et des moules sont
faits de matériau d’un pouce d’épaisseur. »
(5) Le patron ayant été fait pour
un couple particulier, il est placé sur une pièce de bois grossièrement
débillardée et la courbe prise exactement de la forme de ce patron. Une
fois que chaque couple de la membrure a été enlevé, ils sont fixés
ensemble par les lattes du plancher – de minces bandes de bois, - et
sont posés à travers pour garder la membrure ensemble et c’est numéroté
comme cela l’est sur le modèle; le centre de chaque portée est aussi
marqué.
(6) Toutes les courbes étaient
prises directement du modèle ou peut-être seulement dix ou douze,
suffisamment pour donner la forme au bateau. La courbe du mi-bateau est
la première de ces courbes à être fixée en place, suivie du croc avant
et ensuite du croc arrière. Les autres couples sont ensuite espacés en
convenablement, séparés de peut-être dix ou douze pouces dans un bateau
à moteur.
(7) Chaque couple est mis à niveau
afin d’apporter la marque sur la portée directement sous la ligne entre
l’étrave et la poupe – la « ligne du milieu. »
(8) Lorsque 10 ou 12 couples sont
cloués à la quille, d’étroites lattes sont posées à l’extérieur des
coules de chaque côté, de l’étrave à la poupe, huit lattes de chaque
côté. Elles sont espacées du haut des couples jusqu’à la quille. Le plus
important c’est le bastet, qui est posé afin de donner une courbe juste
à partir de la proue, descendant au mi-bateau – la partie la plus basse
d’un bateau à moteur – et remontant encore vers la poupe. Elle est
déterminée en marquant la hauteur désirée à la proue, à la courbe du
mi-bateau et, à la poupe.
(9) Ensuite le constructeur peut
obtenir la forme des couple qui ne sont pas encore posés en prenant le
moule de plomb, le posant à l’intérieur des lattes et en le pressant
contre chacune d’elles. Le moule de plomb serait utilisé de cette façon
jusqu’à ce que tous les couples soient faits et cloués en place. Bien
sûr, tous les couples pouvaient être pris directement du tableau si le
constructeur le souhaitait. Le bateau de vingt-six pieds de Maberly
avait vingt-cinq couples/membrure. Les couples utilisés étaient
d’environ 2 ½” par 2 ½” ou 2” par 2”. Des clous galvanisés de quatre
pouces à pointe carrée ont été utilisés pour fixer les couples à la
quille.
(10) Lorsque toutes les courbes
ont été enlevées, la voûte est enlevée du modèle.
(11) La contre-étrave - tout comme
l’étrave, une pièce de bois naturellement courbée - à laquelle les
bordés sont fixés est elle-même assemblée à l’aide de vis boulons à
l’étrave. La proue du bateau de Maberly, avec son étrave, sa
contre-étrave et ses massifs a une profondeur d’environ neuf pouces et
demi de bois massif bien convenable pour se faire « battre » par la mer.
(12) Le poteau d’amarrage (gump
ou grump post) de quatre pouces carré et à dix-sept
pouces derrière l’étrave dans notre bateau et un peu plus bas, fut
installé vers le début de la construction puisqu’il fut boulonné à la
quille. Quand j’étais enfant, j’étais très intéressée par ce petit
espace de rangement entre le poteau d’amarrage et l’étrave. Le plancher
de cette petite section faisait partie du pont de la cabine, une aire de
rangement couverte avec une petite porte qui prenait environ quatre
pieds et demi dans la proue.
(13) Une fois que le bois avait
été installé avec les massifs en place, les planches de tontures y
étaient mises. Celles-ci étaient deux bandes de planches à l’intérieur
du bateau, parallèles à la tonture, environ un pied ou onze pouces sous
le haut des couples et, clouées à chacun de ces derniers.
(14) Les axes transversaux sont
posés par-dessus les planches de tonture; quelques fois on se posait un
coude aussi pour offrir plus de support à l’axe. Les axes transversaux
étaient situés au croc avant, à la courbe du mi-bateau et, au croc
arrière. En plus d’être un banc pour ramer lorsque nécessaire, ou pour
s’asseoir, ces axes avaient également la valeur de tenir le bateau
ensemble et de le fortifier.
Les bateaux sont décrits comme
étant bordé à franc-bord ou à clins, dépendamment de la façon que le
bordage fut fait. Les premiers bateaux d’Elliston étaient peut-être
construits à clins parce que cela semble mieux convenir à la méthode de
construction par moule mais dépendait sûrement de l’usage qui serait
fait le bateau. Le bordage commence en bas sur un bateau construit à
clins et chaque bordé recouvre partiellement le précédent, tout comme
les bardeaux sur une maison. Le premier bateau à clins que j’aie vu
était un doris utilisé à Bonne Bay, à Terre-Neuve en 1955.
Tous mes informateurs, la plupart
septuagénaires ou jeunes octogénaires en 1970, n’étaient que familier
avec les bateaux bordés à franc-bord. Sur les bateaux à moteur, le bord
de chaque bordé emboîte le prochain de façon à ce que, une fois le
bordage complété, le bateau est bien lisse.
On doit border avec soin, tout
comme les autres aspects de la construction navale. Le bordage doit
suivre la courbe de la membrure et ne doit pas s’éloigner des coudes à
un angle. Le bord extérieur de chaque bordé est légèrement oblique de
façon à laisser une couture pour l’étoupe : les bords intérieurs doivent
être assemblés de façon bien serrée. Une grande couture à l’intérieur du
bateau serait signe de mauvaise main d’œuvre. Pour installer une pièce
de bordé difficile, il fallait parfois la tremper dans de la lessive.
Chaque bordé est tenu en place temporairement par des étaux jusqu’à ce
qu’il soit cloué aux couples en permanence. Le refeuillement est utilisé
pour installer un bordé à la proue et la virure de galbord est
probablement posée dans une rainure sur toute la longueur de la quille.
(15) Avant que ne débute le
bordage, le constructeur prend une bande de bois d’environ trois pouces
ou trois pouces et demi de large et d’environ trois huitièmes de pouce
d’épais. On l’appelle le « bâton règle » et l’utilise comme guide pour
border. Ce bâton règle est courbé autour du bateau tout juste sous la
tonture. En utilisant des compas et le bâton règle, le constructeur
obtient la forme de chaque bordé. Commençant avec le haut de la tonture
et se servant de compas, il mesure chaque couple et transfère la forme
du bord à l’aide de marques de calfatage au bâton règle. Ce dernier est
placé sur le bordé brut et, encore une fois à l’aide de compas, la ligne
pointillée est transférée au bordé brut. Les points sont joints par une
ligne courbée, formant ainsi la forme à scier. Le bord inférieur du
bordé peut être formé de la même façon.
(16) Le bordage, avec des planches
de 1” ou 7/8” d’épaisseur, commence au haut du bateau. Le bordé
supérieur, ou « l’étricot, » est très important. On doit porter grande
attention afin de lui donner une bonne courbe pour donner une belle
apparence au bateau. Les autres bordés, leurs formes étant également
atteintes à l’aide du bâton règle et de compas, sont ensuite ajoutés à
chaque côté du bateau, en enlevant les lattes en même temps que
progresse le bordage jusqu’à ce qu’on atteigne la ligne de flottaison.
Ensuite, le bateau est couché sur son côté et le travaille commence de
la quille vers le haut. Le bordé à côté de la quille est appelé la
virure de galbord. Évidemment, celle-ci doit être aussi serrée que
possible contre la quille et, c’est la raison pour laquelle le
constructeur se sert du refeuillement. Le bordage sur le bateau de
Maberly variait de largeur entre quatre et trois pouces.
(17) Les mesures du bâton règle
sont ensuite prises de la virure de galbord vers le haut et les bordés
sont posés jusqu’à ce qu’il ne reste que la largeur d’un bordé à
remplir. Ce bordé est appelé la virure de « remplissage. » Ici, le bâton
règle est essentiel à une bonne installation. Pour le bord supérieur de
la virure de remplissage, les mesures du compas sur le couple sont
inscrites sur le bâton règle du bord inférieur du bordé immédiatement
au-dessus. Pour le bord inférieur de cette virure de remplissage, les
mesures sont prises du bord supérieur du bordé immédiatement en dessous.
Ce bordé est facilement repérable puisqu’il varie de largeur sur sa
longueur. La virure de remplissage sur le bateau de Maberly était d’un
pouce et quart de large à la proue et de trois pouces de large au
milieu.
(18) Une fois que le bordage est
terminé, deux bandes de bois – les « rubbers » - 3” de large par
3” d’épais ou 2” par 3”, et arrondis à l’extérieur sont fixées à
l’extérieur du bordé supérieur. Elles protègent le plat-bord du bateau.
(19) L’espace dans la proue entre
l’étrave et le poteau d’amarrage est ponté, recouvrant la guirlande. Sur
le bateau de Maberly, la guirlande était faite de trois pièces de bois
de deux pouces d’épaisseur, assemblés solidement ensemble. Une pièce
était posée sur la contre-étrave et s’étendait sur la distance entre les
bords de la proue et, les deux pièces anglées s’étendaient le long des
côtés. La guirlande était boulonnée dans trois directions – à travers
l’étrave et la contre-étrave et des deux côtés de la proue.
(20) Les plats-bords enferment les
bouts des coudes et s’étendaient de la guirlande à l’étrave jusqu’aux
couples pitcher de la voûte. Le haut de la voûte est arrondi
légèrement jusqu’à l’extrémité supérieure de l’étambot.
(21) Les crocs avant ou les coudes
de la voûte sont installés à l’arrière afin de joindre les plats-bords à
l’arcasse comme un coude semblable, le croc avant, est installé dans la
proue afin de joindre les plats-bords et l’étrave. Deux crocs arrière
sont nécessaires pour joindre la voûte et les côtés du bateau. Sur le
bateau de Maberly, une pièce de bois courbée de 26 pouces fut utilisée.
Elle diminuait de six pouces sur les côtés à trois pouces au centre de
la poupe. Un siège de seize pouces s’étendait sur la poupe. Ici, le
capitaine – durant mon enfance, mon oncle Walt – s’assoyait, tenant
l’amintot, un bâton de bois légèrement courbé qui entrait dans un trou
sur l’étambot arrière qui était fixé à un arbre d’acier sur la voûte.
On pouvait en asseoir deux sur ce siège et il y avait une petite aire de
rangement en dessous.
(22) Après que les plats-bords
aient été installés, les pièces de bois protectrices étaient mises en
place. Celles-ci s’étendent tout autour des plats-bords et sont
légèrement plus haut que ces derniers.
(23) Dans le fond du bateau, la
carlingue ou la contre-quille, une bande de bois de trois ou quatre
pouces de large, est posée parallèlement à la quille à travers les
planchers, s’adaptant aux couples. Elle est boulonnée à la quille afin
de fixer les couples du plancher à la quille. À l’époque où les bateaux
à pièges étaient poussés par des voiles, un trou était fait dans la
carlingue afin de tenir le mât en place. On donnait un « plafond » au
plancher du bateau, c'est-à-dire qu’on bordait l’intérieur du bateau
par-dessus la membrure, tout comme on le faisait avec le bordage à
l’extérieur. Ces bordés ne se rendaient pas jusqu’en haut; ils
s’arrêtaient à la ligne de flottaison. L’espace ou la cavité formé entre
le plafond et le bordage extérieur était recouvert de bois – le
sperking – entre les couples. Ceci empêchait des saletés d’entrer
entre le plafond et le bordé extérieur.
(24) Un autre boulot était de
shooter le bateau, c'est-à-dire d’installer une plateforme à niveau
entre le croc avant et la contre-étrave et, une entre le croc arrière et
la voûte. La plate-forme avant fournissait un plancher à la cabine avant
et une aire nivelée pour rester debout dans la pièce debout. La
plate-forme arrière fournissait un plancher pour la cabine arrière et
pour la pièce debout arrière ou le cockpit.
(25) Le bateau était divisé en
chambres ou compartiments par les cloisons – des bandes de planches
fixées sous les axes transversaux, remplissant l’espace entre ces axes
et le plafond du bateau.
Pour la pêche au piège, les
cloisons étaient enlevées. La première chambre dans le bateau était la
chambre debout avant, à côté de laquelle il y avait la chambre du
mi-bateau et finalement, la chambre étroite, le cockpit comprenant la
cabine arrière. La cale ou la salles des machines se trouvait quelque
peu en arrière du milieu du bateau et était assez étroite puisque la
plupart de l’espace était pris par les engins eux-mêmes. Ici, on
retrouvait aussi une petite écoutille rectangulaire dans le plafond qui
donnait accès à la cale. Toute l’eau s’amassait dans la cale puisque
c’est la partie la plus bases du navire. Elle était alors écopée à
l’aide d’un piggin – un petit seau. Il y avait un trou de bonde
dans la cale, traversant le galbord. Ce dernier était pratique pour
sortir l’eau de la cale lorsque le bateau se trouvait sur la rive. Il
était fermé à l’aide d’un bouchon de bois.
(26) Avant que le scellement de
l’engin – de lourds blocs de bois sur lequel l’engin serait posé – fût
installé, ou la salle des machines construite, il restait de l’ouvrage à
l’extérieur du bateau dont on devait s’occuper. Toutes le coutures
devaient être calfatées. Les bordés avaient des bordures quelque peu
obliques afin d’offrir une couture pour bien accueillir l’étoupe roulée.
Se servant d’un ciseau de calfat et un maillet, le constructeur
enfonçait l’étoupe dans les coutures. Pour s’assurer que les coutures
étaient étanches à l’eau, elles étaient recouvertes de brai et on
grattait le brai excédentaire. Ensuite, le bateau était peinturé. Son
fond, jusqu’à la ligne de flottaison, était habituellement peinturé de
cuivre. En haut de cela, la couleur choisie dépendait de son
propriétaire et, bien sûr, de la disponibilité de toute couleur. Des
couleurs populaires étaient le blanc, bleu, gris et vert. Je ne me
souviens de personne qui a peinturé son bateau à moteur d’une couleur
foncée mais, je pense que Grand-Père Tilly utilisait un bateau bully
noir; peut-être qu’il était goudronné au lieu d’être peinturé.
L’intérieur d’un bateau était habituellement peinturé d’une couleur plus
foncée que l’extérieur. Des couleurs populaires à Elliston étaient des
teintes foncées de bleu, vert et gris.
(27) Il y avait nombre de petits
boulots qui étaient essentiels à la complétion d’un bateau. Les
toletières devaient être posées sur les plats-bords aux bancs de nage de
l’avant, du milieu et de l’arrière du bateau ainsi que sur la voûte. Sur
le bateau de Maberly, celles-ci étaient des pièces de planches, chacune
allant de neuf pouces à un pouce et, d’un pouce d’épaisseur, clouées aux
plats-bords. Deux trous étaient percés dans les plats-bords pour les
tolets. Ceux-ci étaient utilisés partout, sauf peut-être dans la
toletière de la voûte, si le bateau à moteur servait comme bateau à
piège. Les tolets étaient essentiels au hissage des pièges, utiles pour
y attacher des cordes et des lignes. L’aviron de godille à l’arrière
était peut-être monté sur une toletière galvanisée ou il y avait
peut-être un vide sur le dessus de la voûte ou un trou directement dans
la voûte pour le loger.
(28) Une autre dépendance pour le
bateau à moteur était le gouvernail. Ce dernier pouvait être fixé d’au
moins deux façons. Je suis au courant des deux façons utilisées dans la
région d’Elliston. Pour l’une, une longue barre de fer s’étendait de la
partie supérieure de l’extérieur de la voûte jusqu’au sabot de la
quille. Le gouvernail était fixé à un étambot arrière de bois qui avait
sur lui des anneaux de fer qui glissaient autour de la barre de fer. Ce
gouvernail et cet étambot étaient entrés dans le bateau lorsque ce
dernier ne servait pas, par exemple, alors qu’il était ancré ou sur le
collet. Le deuxième type était fixé en permanence sous le tableau. Il
était fixé à une barre de fer ou une aiguille appelée « aiguillot » qui
tournait dans une crapaudine appelée un « fémelot, » située sur le sabot
de la quille. La « tringle » sortait depuis le fond du bateau par les
plates-formes arrière et l’amintot était complètement à l’intérieur du
bateau. Pour le premier type de gouvernail, l’amintot devait être plus
long que pour le deuxième type. Il était fait de bois et un de ses bout
entrait dans un trou dans l’étambot arrière afin qu’il puisse facilement
être balancé par-dessus le plat-bord de la voûte. Pour le deuxième type
de gouvernail, veuillez consulter la page 65.
Je n’ai adressé exclusivement que
le bateau à moteur dans cette description de la construction par modèle.
Un petit rodney était construit de la même façon toutefois la finition
de l’intérieur ne prenais pas autant de temps. Il n’y avait pas de
cabine, pas de salle de machines et, bien sûr pas de propulseur ou de
gouvernail à installer. Pourtant, la même dextérité était requise. Comme
l’a dit Noah Chaulk, « Il est construit de la même façon qu’un bateau à
moteur, il est seulement que plus petit. »
Construction par moule
M John Barrett de Old Perlican,
Baie Trinity, fut le constructeur en 1970 qui m’a décrit, par textes et
diagrammes, comment on construisait un bateau par « moule entier. » Les
trois parties du moules desquelles il m’a fait un croquis ressemblaient
à celles du vieux moule Tilly d’Elliston, particulièrement la forme du
« vide » qui semble être plus large et plus court que celui utilisé par
les constructeurs de Winterton. Dans ses dessins, il a indiqué comment
le « vide » était placé en relation aux deux autres parties de façon à
obtenir les différentes courbes.
La construction de bateau par
moule différait de la construction par modèle seulement dans la méthode
suivie afin d’obtenir la forme du bateau. Les techniques de construction
étaient pareilles et suivaient le même ordre, la quille étant la
première à être posée à laquelle on assemblait l’étrave et les étambots.
Pour poser la membrure par la
méthode de moule, le constructeur se servait de trois pièces de bois,
marquées à intervalles spécifiques et manipulées de façon à lui donner
toutes les courbes pour la membrure. Les pièces étaient le « couple »,
le « vide » et le « guide de tonture. » Ce dernier avait l’échelle pour
l’emplacement du croc arrière d’un bord et celui du croc avant de
l’autre ou le constructeur avait peut-être deux guides : l’un appelé le
« guide de tonture arrière » et l’autre, le « guide de tonture avant. »
La pratique générale semblait être
d’utiliser le moule pour obtenir la courbe du milieu du bateau, le croc
arrière et le croc avant et aussi, le « premier à en avant, » à la mi
chemin entre la courbe du milieu du bateau et le croc avant et, le
« premier à en arrière, » à la mi chemin entre la courbe du milieu du
bateau et le croc arrière. Ayant enlevé cinq courbes, le constructeur
utilisait parfois un moule de plomb pour la forme des autres couples. M
Barrett a dit : « Les couples qui vont entre ceux-là peuvent être
obtenus de la même façon ou, une fois que le bateau est latté, on peut
se servir d’un moule de plomb. » C’est le même conseil qui fût donné par
ceux qui construisent par modèle.
La terminologie employée ici dans
la langue originale anglaise, avant la traduction, indique les racines
Middle English de cette méthode de construction navale.
Lorsqu’on commence la construction
d’un bateau par moule, il est primordial de voir à ce que les mesures
des parties du moules sont en bonnes proportions à la taille du bateau
voulu. Les mesures diffèrent en conséquence. Voici comment on pourrait
se servir d’un moule dans la construction d’un petit bateau de 4 pieds
de large, 16 pieds de long et 1,5 pied de profond :
Courbe du mi-bateau. (MB)
(1) La première de ces courbes
faites est la courbe du mi-bateau (MB). Pour obtenir la largeur du
bateau, il faut mesurer du haut du moule à couple jusqu’à sa base,
disons quatre pieds de large. L’échelle : un pouce à un pied. Pour
marquer la courbe du mi-bateau (MB), tu te sers des guides comme
démontrés. Dessine la forme de la courbe avec de la craie ou une pointe
tranchante. Mets des clous à intervalle sur cette ligne. Fais un moule
de plomb ou de d’autre matériau de la forme de cette ligne. Place ce
moule sur le coude pour obtenir la courbe de mi-bateau, comme démontré.
(2) Maintenant, fais en un autre
de la même forme et assemble les comme démontré. Les deux bords sont
tenus ensemble à la base par une pièce de bois appelée la « varangue. »
(3) Le croc avant (FH) :
Le croc avant, si le bateau est de
quatre pieds de large à la courbe du mi-bateau, devrait mesurer six
pouces de moins. Il est également habituellement plus étroit que le croc
arrière. Le croc avant, une fois assemblé, fait sa propre largeur depuis
l’étambot. Il est posé sur la quille de façon à ce que le haut d’une
courbe touche l’étambot; le haut de l’autre courbe sera au dessus de la
varangue du couple. Ceci assurera une bonne position.
(4) Le croc arrière (AH)
Comme il le paraît une fois
terminé (Voir l’illustration montrant les courbes principales à la page
71.) Le prochain est obtenu en couchant celui-ci sur le bois et en le
marquant identiquement.
(5) Placer la varangue au dessus
du croc à la base afin de garder les bords ensemble. Fortifier les bords
ensemble en dessous.
(6) Le « Premier à en avant »
(FF):
Il va entre la courbe du mi-bateau
(MB) et le croc avant (FH).
(7) Ensuite, le « premier à en
arrière » (FB). Il est situé entre le croc arrière et la courbe du
mi-bateau. Ceci complète cinq courbes (également appelées des couples).
Les couples qui vont entre ceux-ci peuvent être obtenus de la même façon
ou bien, une fois que les couples ont été lattés, on peut se servir d’un
moule pour obtenir la forme de la membrure qui reste. (Voir
l’illustration à la page 72.)
Les couples sont séparés par huit
à dix pouces. Le « premier à en avant » (FF) est placé à mi chemin entre
la courbe de mi-bateau et le croc avant (FH). Entre le croc avant et la
guirlande, on y trouve les couples pitcher avant #1, #2, # 3 et,
# 4. Entre le croc arrière et la voûte, les couples pitchers
arrière #1, #2, #3 et, #4. (Voir l’illustration à la page 72.)
Une fois que les couples sont
posés, le reste du procédé de la construction est comme celui de la
construction par modèle.
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À cause du besoin de travailler à
une vente impliquant l’emplacement sévère de lignes sur une planche
droite, le bateau construit par moule avait, d’après moi, moins
d’individualité qu’un fait à partir d’un modèle, qui était formé d’après
la forme exacte qui plaisait au constructeur et au propriétaire. Le
bateau était fait exactement ainsi. Noah Chaulk a dit que les bateaux
plus vieux d’Elliston, construits par moule, avaient tendance à être
plus larges de la proue, leur donnant une apparence maladroite alors que
les bateaux construits par modèle, avec une proue plus régulière,
étaient gracieux. Les bateaux construits par modèle variaient entre
chaque constructeur et, parfois les bateaux construits par un seul
constructeur variaient dépendamment des besoins des propriétaires. Il y
avait aussi des caractéristiques des bateaux construits dans une
communauté qui les distinguaient de ceux construits ailleurs. En
général, les bateaux de Bonavista semblaient être profonds avec une
proue hardie. Mon informateur principal d’Elliston, Thomas Porter, a dit
qu’ils avaient des étraves et des tableaux verticaux tandis que les
bateaux de Catalina avaient des grandes proues évadées et qu’ils étaient
moins profonds les derniers plus gracieux. « Comme un minion et un
tonneau » fut l’observation de Noah Chaulk à propos des deux types.
Philip Hicks a dit que les bateaux de Catalina étaient conçus pour une
mer plus violente. Puisque la mer est violente, spécialement à Maberly
et The Neck, on comprend que tous les bateaux à piège là étaient de la
conception moins profonde de Catalina. Par contre, au cours des années
quarante et cinquante, certains équipages de The Point et North Side –
Lewis Porter, Garland Porter, Samuel White et, George Oldford – se
servaient de bateaux « Bonavista. »
Construire un bateau était souvent
un effort coopératif. Comme a commenté l’un de mes informateurs : « Ça
prenait plus d’un jour, hen? » Lorsqu’un bateau était prêt pour l’eau,
tous les hommes valides autour se rassemblaient pour le lancement. Des
bâtons ronds étaient couchés et on y poussait et tirait le bateau. Les
hommes se mettaient de chaque côté du bateau et l’un d’eux commençaient
à chanter « Jolly Parker. » Aux mots « Heave my jolly pokers! » tout le
monde poussait et le bateau se mettait à rouler vers la mer.
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Une fois lancé, un bateau à moteur
demeurait sur l’eau tout l’été sauf s’il devait être sorti à cause d’un
défaut qui n’avait pas été remarqué avant son lancement. Chaque automne,
tous les bateaux étaient traînés sur la rive. Au cours des années
quarante, sur le North Side, la plupart des bateaux passaient l’hiver
sur la rive à Noder Cove; le pont en face du quai gouvernemental pouvait
recevoir la majorité des bateaux de l’anse; par ce temps-là, les bateaux
de The Neck qui, auparavant étaient traînés sur la rive près de Follet’s
Cove sur le côté sud de Sandy Cove Reach, s’étaient joints au bateaux
Maberly « over below. » Je me souviens que le nôtre hivernait juste en
haut de Charlie’s Cove, près de l’étable à moutons à Bobby et Ike
Chaulk.
Habituellement, on enlevait
l’engin pour l’hiver et le bateau était soit renversé et recouvert de
planches pour le protéger ou bien, il était laissé à l’endroit et
recouvert. D’autres passaient l’hiver dans des hangars. Au printemps, on
vérifiait très bien tous les bateaux et on peinturait leur intérieur et
leur extérieur avant leur lancement. Si t’étais chanceux, quelqu’un
t’offrait un voyage jusqu’au collet.
Au début du dix-neuvième siècle,
les bateaux étaient utilisés à Elliston pour le transport de biens et de
gens mais, par la fin du siècle, des chemins convenables à la
circulation à l’époque des chevaux liaient Elliston à tous les endroits
près. Quoi qu’on se servait toujours de bateaux lors du vingtième siècle
pour le transport de peaux de la baie ou pour apporter du sel d’une
goélette directement aux lieux de pêche, par ce temps-là, le bateau
n’était plus un moyen de transport essentiel – le cheval l’était
maintenant. Avant l’avènement de camions, des chevaux transportaient les
grands articles, non seulement ceux reliés à la pêche mais également
ceux au ménage et à la famille.
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